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l'art rupestre

Pourquoi l'art rupestre?

« Je pense que si vous êtes un archéologue ou tout autre chercheur qui exige de connaitre l’ensemble du contexte d’un site rupestre, à savoir qui l’a créé, pourquoi, comment, quand, etc., vous n’êtes pas fait pour l’étude de l’art rupestre. Le mystère associé à de tels sites, c’est justement cela : le fait de ne pas nécessairement tout savoir à son sujet lui confère une partie de son charme. Je pense que pour la communauté scientifique, en ce moment, il s’agit bien souvent d’une série de questions sans réponse. On se demande : “ Que pouvons-nous véritablement dire à son propos et comment diable allons-nous le déterminer ? ”  J’ai appris qu’il existe dorénavant différents moyens qui aident à l’étude des pétroglyphes. Mais du point de vue scientifique, l’interprétation de ce patrimoine mène le plus souvent à une impasse. »

Doris Lundy, Colombie-Britannique. Spécialiste de l’art rupestre

Les sites rupestres sont intégrés dans la cosmologie et les croyances des peuples autochtones. Ils sont imbriqués dans la communication entre les humains et le monde spirituel. Ce sont des endroits privilégiés pour des activités rituelles. Ils sont souvent liés aux hommes médecine qui sont à l’origine de la création des images et qui y pratiquaient différents rituels, dont ceux de guérison. Les sites sont aussi liés à la quête de vision des jeunes lors des rituels de puberté alors qu’ils cherchent à entrer en relation avec un esprit gardien. Ils étaient et sont toujours des endroits tout désignés pour cette communion entre les humains et les esprits. Les images rupestre représentent souvent les visions obtenues.

Photographie de peintures rupestres à l'ocre rouge représentant trois Oiseaux-Tonnerre au site Wizard Lake en Ontario, Canada
Trois Oiseaux-Tonnerre au site de Wizard Lake, Ontario, Canada

Photo : Collection privée

Ces liens cosmologiques et spirituels sont soutenus par l’art rupestre parce que des forces spirituelles y résident et que les êtres surnaturels peuvent y être sollicités pour leurs savoirs et leurs pouvoirs. Parfois, ces êtres sont considérés comme les auteurs des images rupestres. En Colombie-Britannique, des motifs sont parfois représentés sur des rochers considérés comme des êtres mythologiques transformés. Conséquemment, ces sites sont souvent jugés favorables à la transmission du savoir et permettent aux novices comme aux initiés de recevoir un enseignement à caractère spirituel. D’ailleurs, il est intéressant de constater que le toponyme Kinoomaagewaabkong du Peterborough Petroglyphs en Ontario signifie « les roches qui enseignent ».

Les images rupestres étaient aussi créées pour commémorer certains évènements historiques. Dans les Plaines de l’Ouest, des scènes représentant des combats de guerriers se retrouvent à Áísínai’pi. D’autres lieux en Colombie-Britannique commémorent des batailles ou des naufrages. En Nouvelle-Écosse, des images de navires, des scènes de chasse, des représentations d’hommes et de femmes, ou encore des dates gravées sur la pierre, documentent la venue des Européens et des faits importants de l’histoire des Mi’gmaq.

Photographie d'une gravure rupestre représentant le motif d'une croix avec la date 1888 au site Miller's Mountain en Nouvelle-Écosse, Canada
Motif de croix avec la date 1888 au site de Miller’s Mountain, Nouvelle-Écosse, Canada

Photo : ©Bryn Tapper, Memorial University of Newfoundland

Les images rupestres sont dotées de pouvoirs qui leur permettent d’agir et d’influencer le monde des humains. Elles peuvent notamment contribuer à la guérison, participer à la magie sympathique et favoriser la chasse. Les sites représentent parfois des prophéties ou des évènements futurs.

De tels lieux servaient aussi à marquer le territoire à différentes fins. En Colombie-Britannique, certains indiquent des endroits propices pour la pêche au saumon ou inscrivent dans le paysage les limites territoriales de différents groupes.

L’art rupestre se trouve souvent le long de voies navigables telles que des lacs et des rivières, à des endroits stratégiques comme des portages ou des intersections de routes. Dans le Bouclier canadien, on pouvait s’arrêter à de tels emplacements pour demander la protection d’entités spirituelles. On y pratiquait des rituels où on invoquait les êtres surnaturels pour obtenir leur aide et s’assurer des voyages réussis et sans danger. Parmi les Nlaka’pamux (Salish) qui habitent le sud de la Colombie-Britannique, des images ont été créées pour obtenir la protection des esprits contre les ennemis ou contre des malheurs comme la maladie.

Art rupestre et tradition orale

Plusieurs histoires associées aux sites rupestres sont connues et transmises au sein des communautés autochtones. De nombreux récits se transmettent seulement entre initiés puisqu’ils relèvent du savoir sacré : ils ne sont donc pas accessibles à un large public. Il arrive cependant que certaines connaissances nous parviennent pour que nous puissions mieux comprendre la richesse du phénomène. L’histoire qui suit, recueillie au Manitoba, nous en apprend davantage sur l’étroite connexion entre l’art rupestre, les hommes médecine, les Memekwueshuat et leurs pouvoirs spirituels de guérison.

La légende de la peinture rupestre d’Oxford House

Une femme de la bande d’Oxford House étant très malade, sa famille demanda à un vieillard du nom de Mistoos Muskego de venir la soulager de sa maladie. Celui-ci essaya à maintes reprises de la guérir, mais rien ne semblait fonctionner. En fin de compte, le vieillard déclara qu’il ne restait plus qu’un seul espoir : aller demander aux hommes vivant dans le rocher de lui donner le remède puissant nécessaire à la guérison de la femme. Il quitta ainsi dans son canoë et pagaya jusqu’à l’endroit qu’il connaissait comme le lieu de résidence de ces hommes (de nos jours, cet endroit est une paroi rocheuse granitique qui s’élève abruptement au-dessus de la rivière Semple, comme à l’époque de Mistoos Muskego). Très puissant, Mistoos Muskego utilisa ses pouvoirs pour pénétrer dans la roche et dans le lieu où résidaient les hommes qu’il souhaitait rencontrer. Il discuta longuement avec ceux-ci et leur demanda le remède permettant de guérir la femme. Les hommes acquiescèrent à sa demande et le vieil homme retourna chez la femme malade afin de lui administrer le remède qui lui apporta finalement la guérison.

Heureux de ce rétablissement, Mistoos Muskego souligna que tous devraient se souvenir que des hommes puissants ont pu remettre un remède à un vieillard puissant. Il fabriqua ensuite une peinture et demanda à tous les gens présents de l’accompagner là où résidaient les hommes rencontrés. Tous se rendirent alors en canoës jusqu’à la paroi rocheuse, où Mistoos Muskego quitta son embarcation pour se tenir debout sur les pierres en bordure de l’eau. Il décrira ensuite aux gens rassemblés la manière dont il avait reçu le remède. Puis, il déclara que personne ne devrait oublier ces hommes et que pour s’en assurer, il allait les immortaliser par une peinture. Il créa ainsi une oeuvre d’approximativement deux pieds de hauteur comprenant des personnages bâtons dotés de traits émergeant de la tête, ressemblant à des oreilles de lapin. Ainsi, cette représentation permettra aux gens de se rappeler l’endroit où résidaient ces êtres ainsi que de leur apparence. Par la suite, ils retournèrent tous chez eux.

Récit raconté à C. J. Wheeler dans la communauté de la Première Nation de Cris de Bunibonibee (Oxford House). Récit adapté de Wheeler, C. J. (1975).

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