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Découvrir
l'art rupestre

Sur tous les continents, ou presque...

L’art rupestre se retrouve sur tous les continents, à l’exception de l’Antarctique. Bien que ce mode d’expression soit universel, on reconnait des spécificités à chaque continent en termes de localisation, de représentation, de datation et de vocation des sites. On ne peut en déterminer le nombre précis dans le monde, mais on estime qu’il en existerait plusieurs centaines de milliers. Cette estimation est d’autant plus difficile que leur définition demeure ambigüe. On peut référer à des régions entières regroupant des milliers d’images aussi bien qu’à des endroits bien circonscrits, comme une falaise ou une grotte, où les représentations sont peu nombreuses.

L’Australie et le continent africain sont parmi les plus riches quant à la diversité et le nombre de sites rupestres. Des centaines de milliers sont répartis dans tout le territoire autralien. Les concentrations les plus importantes se retrouvent dans les régions de Kimberley, Arnhem Land, Laura et Pilbara. Ayant été réalisés sur une très longue période de temps, les plus anciens pourraient dater de près de 40 000 ans. La création de tels sites s’est poursuivi jusqu’au 20e siècle. Il s’agit de la plus ancienne et de la plus longue tradition de production d’œuvres rupestres au monde.

Photographie d'une gravure de girafes grandeur nature à Dabous dans le Sahara, Niger
Gravure de girafes grandeur nature à Dabous dans le Sahara, Niger. Ces images pourraient dater de 6 000 ans.

Photo : ©The Trustees of the British Museum

On compte également des centaines de milliers de sites rupestres à travers toute l’Afrique bien qu’il y ait deux aires majeures de concentration : le Sahara et l’Afrique australe. L’art de la région saharienne (Algérie, Tchad et Niger) se compose surtout de gravures et de peintures qui illustrent des anthropomorphes, des êtres mythiques ainsi que des mammifères comme des dromadaires ou des girafes. En Afrique australe (Namibie, Zimbabwe, Tanzanie et Afrique du Sud), on retrouve des images d’anthropomorphes, de thérianthropes qui conjuguent des traits humain et animal et d’élans du Cap. Ils étaient très importants dans les croyances des peuples San. Chez ces derniers, la tradition de créer des œuvres rupestres remonte à 3 500 ans environ avant notre ère et s’est poursuivie jusqu’au 19e siècle.

L’art rupestre asiatique est aussi très riche. En Asie du Sud, les centaines d’abris sous roches du complexe Bhimbetka en Inde centrale sont les plus connus. Les pictogrammes y représentent des scènes de chasse, des batailles, des danses ainsi que des figures mythologiques. L’Asie du Sud-Est est reconnue surtout pour les peintures rupestres dans des cavernes. En Indonésie, sur l’ile de Sulawesi, certaines peintures pariétales ont été datées de 35 000 à 40 000 ans, les classant parmi les plus anciennes images figuratives au monde. En Océanie, on retrouve surtout des pétroglyphes. Les motifs incluent des abstractions, des anthropomorphes, des visages humains, des animaux et des êtres mythologiques, comme l’homme-oiseau.

Photographie d'une peinture rupestre localisée à Bhimbetka en Inde. Scène représentant des hommes à cheval et à pied, revenant de guerre ou d'une chasse collective.
Peintures rupestres dans l'abri no 8, Bhimbetka, Inde. L'œuvre représente des hommes à cheval et à pied, revenant de guerre ou d'une chasse collective.

Photo : ©Bernard Gagnon / Wikipedia Commons

En Europe, on retrouve quelques milliers de sites rupestres. Les plus connus sont les grottes ornées de France et d’Espagne, qui datent du Paléolithique supérieur (il y a 45 000 à 10 000 ans). Sur le plan des représentations, les animaux dominent. Ils sont accompagnés d’empreintes de mains et de figures géométriques. L’art rupestre européen comprend aussi les pétroglyphes de la Scandinavie et de la Russie septentrionale, créés entre 5 000 et 500 ans avant notre ère. Ces images incluent des anthropomorphes, des bateaux, des armes, des orignaux, des scènes de chasse et de labour.

Dans l’Europe atlantique (Angleterre, Irlande et Espagne), on retrouve des pétroglyphes abstraits et de l’art mégalithique – des gravures sur de larges pierres et sur des monuments en pierre – comme à Brú na Bóinne en Irlande. Cet art date de la période néolithique, c’est-à-dire de 4 000 à 2 500 avant notre ère.

L’art rupestre de la région alpine (Italie et France) regroupe des gravures à ciel ouvert qui représentent, entre autres, des anthropomorphes, des maisons, des scènes de batailles et de labour, du bétail et des figures géométriques. Cet art a été créé au Néolithique (4e millénaire avant notre ère), à l’âge du Bronze (2e millénaire avant notre ère) et à l’âge du Fer (1er millénaire avant notre ère).

Photographie d'une peinture rupestre localisée au parc national de Serra da Capivara au Brésil. Elle représente de nombreux animaux tels que les reptiles.
Site dans le parc national de Serra da Capivara, Brésil

Photo : ©Dagmara Zawadzka, Université du Québec à Montréal

En Amérique du Sud et du Nord, on retrouve une énorme variété d’œuvres rupestres qui datent de plusieurs époques et s’étendent de la Patagonie à l’Alaska. Cette variété comprend les géoglyphes de Nazca au Pérou, d’immenses représentations d’animaux (par exemple, singe et baleine), des phytomorphes et des anthropomorphes ainsi que des figures géométriques. L’un des endroits le plus riche est le parc national de Serra da Capivara dans le nord-est du Brésil, où des pictogrammes sont répartis dans des centaines d’abris sous roches. Ceux de la Basse-Californie, Mexique, sont surtout connus pour leurs peintures monochromes et polychromes, grandeur nature, d’anthropomorphes et de zoomorphes. En Californie, les peintures polychromes abstraites et figuratives du peuple chumash sont parmi les plus élaborées en Amérique du Nord. Le Grand Bassin des États-Unis (Nevada et Californie) est surtout connu pour ses pétroglyphes de mouflons et ses anthropomorphes. En Utah, les pictogrammes représentent des anthropomorphes statiques, grandeur nature, qui semblent dévisager les visiteurs.

Au Canada, d'un océan à l'autre

Carte du Canada où sont localisés certains sites rupestres
Carte de localisation de certains sites canadiens

Wikipédia

Au Canada, l’art rupestre est présent d’un océan à l’autre. Le nombre exact de sites n’est pas encore connu, mais on pense qu’il en existe environ 3 000. Comme ailleurs dans le monde, l’évaluation du nombre demeure approximative en raison des destructions naturelles (l’érosion) et anthropiques (le vandalisme). De plus, l’intérêt scientifique varie d’une région à l’autre du pays. Ainsi, l’art rupestre en Ontario a été beaucoup plus étudié qu’au Québec : ceci se reflète par le nombre répertoriés à ce jour dans chaque province.

Dans les provinces atlantiques, seulement 14 sites de pétroglyphes ont été confirmés en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, essentiellement sur des affleurements rocheux et des rochers ou blocs erratiques, souvent à proximité de plans d’eau. Ils datent principalement de la période post-contact.

La partie du Bouclier canadien qui s’étend du Québec à la Saskatchewan abrite autour de 800 emplacements contenant des pictogrammes, dont la majorité a été répertoriée en Ontario. Au Québec, on en connait une vingtaine. Au Manitoba, il y en a près de 120, en Saskatchewan, environ 75 et un seul est connu dans les Territoires du Nord-Ouest. Les grandes concentrations se trouvent dans le nord-ouest de l’Ontario, l’est du Manitoba et le nord-est de Saskatchewan, le long de la rivière Churchill. La majorité des sites de pictogrammes sont à ciel ouvert, sur des falaises qui longent les lacs et les rivières. Quelques autres ont été découverts sur des rochers, des blocs erratiques, dans des abris sous roches, près ou non de l’eau. Seule une trentaine de sites contient des pétroglyphes. On les répertorie sur des affleurements rocheux et des blocs erratiques près de l’eau mais aussi en pleine forêt. On retrouve également des pétroformes et des lichénomorphes. Les pétroformes illustrant des tortues, des oiseaux ou des anthropomorphes se trouvent principalement au Manitoba (dans le parc provincial de Whiteshell); quelques autres sont présents dans le Nord-Ouest ontarien. L’existence de lichénomorphes a été rapportée dans les sources ethnohistoriques et ethnographiques, mais leur nature éphémère a empêché une étude approfondie de ce phénomène.

Dans les Plaines (Saskatchewan, Alberta), un très grand nombre de pétroglyphes et de pictogrammes se trouvent sur des falaises, des rochers, des blocs erratiques et des affleurements rocheux. Parmi les plus importants d’Alberta, on compte le complexe de Writing-on-Stone, ceux de Verdigris Coulee, de Crossfield Coulee, Zephyr Creek, Okotoks Erratic et Grotto Canyon. En Saskatchewan, le St. Victor Petroglyphs et le Herschel Petroglyphs sont parmi les plus connus. Les pétroformes des Plaines représentent des anthropomorphes, tels des serpents, des bisons et des tortues. On y retrouve aussi des rochers sur lesquels des lignes ont été gravées pour évoquer la colonne vertébrale et les côtes des bisons. Parfois, on y a ajouté par piquetage, des yeux, des oreilles, une bouche et des cornes pour accentuer la ressemblance à cet animal. Ces rochers sont connus sous le nom de ribstones. Plusieurs sont situés dans des endroits qui permettent d’avoir une vue panoramique du paysage environnant.

La Colombie-Britannique est extrêmement riche en art rupestre. On y retrouve près de 1 300 lieux de pétroglyphes et de pictogrammes sur la côte Nord-Ouest et à l’intérieur des terres. Quelques-uns combinent l’un et l’autre. Les quelque 800 localisés sur la côte se situent sur des rochers, des affleurements rocheux, sur des falaises et parfois même dans des cavernes. Les artistes choisissaient le plus souvent des lieux associés à la mer ou aux rives des lacs et des rivières. Les plus importantes concentrations sont celles de la vallée du Fraser, de Squamish Valley, de la péninsule Sechelt, de l’ile de Vancouver, de l’ile Gabriola, de Roscoe Inlet, de Spiller Channel, du fleuve Skeena et de la péninsule Tsimpsean dans le nord de la province. Les territoires des Kwakwaka’wakw (Kwakiutl) et des Salish de la Côte sont particulièrement riches en pictogrammes. On estime à 500 le nombre se trouvant sur le plateau intérieur, essentiellement de pictogrammes réalisés sur des affleurements rocheux ou dans des abris sous roches. On connait une quarantaine de sites de pétroglyphes situés pour la plupart près des cours d’eau. Enfin, il existe une concentration importante dans la vallée de la rivière Stein, dans le canyon Fraser et au lac Stuart ainsi que le long du fleuve Fraser.

Au Nunavik (Québec), on retrouve quatre lieux comportant des gravures rupestres. Ils sont actuellement les seuls connus de tout l’Arctique canadien. Tous sont localisés dans la partie est de la péninsule d’Ungava. Le plus connu est celui de Qajartalik.

Photographie de l'immense falaise du site de Bon Écho situé au lac Mazinaw en Ontario. S'élèvant jusqu'à 100 mètres au-dessus du lac et s'étendant sur 1,5 kilomètre, ce lieu regroupe plus de 260 pictogrammes.
Falaise du site de Bon Echo, lac Mazinaw (Ontario). Ce lieu est reconnu pour son écho remarquable. La falaise s'élève jusqu'à 100 mètres au-dessus du lac et s'étend sur 1,5 kilomètre. On y retrouve plus de 260 pictogrammes, ce qui en fait l'un des sites rupestres les plus importants au Canada.

Photo : ©Dagmara Zawadzka, Université du Québec à Montréal

 

Importance du lieu et du paysage

Les recherches en art rupestre ont bien démontré l’importance de l’emplacement des représentations pour comprendre leurs significations et leurs fonctions. Les sites rupestres sont souvent associés à des forces spirituelles et sont habités par des êtres non-humains, comme en attestent certaines histoires orales des peuples autochtones.

Au Canada, les œuvres connues se trouvent principalement sur des emplacements à ciel ouvert. On croit que les aspects naturels des lieux ont pu présider au choix d’y exécuter des œuvres rupestres. Les caractéristiques de la surface du rocher, comme sa couleur inusitée, la présence de fissures, de veines de quartz, des revêtements de silice ou de calcite qui brillent sous les rayons du soleil, constituent des critères de sélection. La forme du rocher a aussi son importance puisque les pouvoirs se concentrent souvent dans des formations géologiques inusitées comme les hoodoos (cheminées de fées), les rochers à effigies ou de hautes montagnes. Ainsi, des sites rupestres placés sur de hautes falaises sont souvent associés à la présence d’entités spirituelles dotées de pouvoir.

De même, les particularités du paysage environnant, comme la présence de hautes montagnes ou de chutes d’eau, augmentent la charge spirituelle du lieu. Les anomalies acoustiques, comme l’écho ou la résonance d’un affleurement rocheux, contribuent également au pouvoir de ces sites. Cela se produit notamment lorsqu’une personne ou un animal marque le lieu de sa présence en se déplaçant ou en émettant tous autres types de sons. Des phénomènes naturels tels que le tonnerre peuvent également y contribuer.

Photographie du site de Diamond Lake en Ontario, au Canada. Sur un afleurement rocheux sont représentés un Serpent cornu, des canoës et une empreinte de patte d’oiseau.
Site de Diamond Lake (Ontario). La couleur blanchâtre de ce rocher lui donne un caractère inusité.

Photo : ©Dagmara Zawadzka, Université du Québec à Montréal

Les sites rupestres du Canada font partie intégrante de l’environnement culturel des Autochtones. Ces endroits sont significatifs pour eux depuis des temps immémoriaux. Ces emplacements font partie d’un réseau de lieux et de routes auxquels sont attachés des pratiques traditionnelles (par exemple, la tenue des cérémonies favorisant la chasse), des récits de création et des toponymes. Les sites d’art rupestre jouent un rôle important, car les histoires et les pratiques rituelles qui leur sont associées entretiennent le lien avec les ancêtres et leur territoire traditionnel.

Toponymie et environnement culturel

Chez les Premières Nations et les Inuit du Canada, les toponymes sont le plus souvent descriptifs et concrets. Ils découlent de particularités du paysage, d’activités ou d’événements associés à des endroits précis. Parfois, ils font référence à l’environnement physique et mettent l’accent sur la topographie, l’hydrographie, la végétation d’un lieu ou même sur les ressources animales. Ils peuvent également être associés à des individus, à des histoires orales, aux esprits ainsi qu’aux pratiques chamaniques. Ils évoquent des informations pratiques sur l’environnement; ils sont notamment utiles pour circuler sur le territoire.

En art rupestre, les toponymes font référence à des êtres puissants, à la présence d’images (Áísínai’pi, Pepeshapissinikan) ou à des individus. Par exemple, un lieu nommé « Fairy » ou fée peut réfèrer aux êtres qui habitent dans les rochers comme les Memekueshuat. C’est le cas de Fairy Point sur le Lac Missinaibi en Ontario. Le site du lac Tétépisca, sur la Côte-Nord du Québec, est nommé par les Innus Memekueshushuap, qui signifie « la maison des Memekueshuat ». Or, à 25 mètres à gauche des panneaux ornés, il y a une grotte qui serait l’entrée de la maison des Memekueshuat.

En Ontario, certains toponymes traditionnels de lieux rupestres, font référence à des oiseaux. Le nom Kaw-gaw-gee Waw-bee-kōng, qui signifie « la falaise blanche du corbeau au bord de l’eau », rappelle que cette espèce fait son nid sur de hautes falaises. Ces images d’oiseaux évoquent aussi les Oiseaux-Tonnerre tandis que les coulées minérales blanchâtres qui se trouvent souvent sur les falaises sont associées à leurs fientes.

Les sites peuvent aussi rappeler la mémoire de chamanes associés à ces lieux. Par exemple, au sud de la ville de Nanaimo en Colombie-Britannique, le site Thuxwum est identifié par le nom d’un chamane y ayant jadis vécu.

Photographie du rocher Kaw-gaw-gee Waw-bee-kōng sur le lac Obabika en Ontario, Canada
Rocher Kaw-gaw-gee Waw-bee-kōng sur le lac Obabika en Ontario

Photo : ©Dagmara Zawadzka, Université du Québec à Montréal

Les créateurs et leurs héritiers

Les grandes aires culturelles associées à l'art rupestre au Canada et dans le monde

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